héritiers d'Hergé (les)

série: Tintin, étude
dessinateur / scénariste: Lecigne Bruno
éditeur: Magic Strip EO 1983
genre: Etude
classement: biblio1
date: 1983
format: cartonné
état: TBE/N
valeur: 60 €
critère: **
remarques: guide chronologique
- repère des oeuvres d'Hergé et de ses héritiers 1930 - 1983
(à noter que Tintin et l'Alph-Art n'est pas mentionné)

A) notes sur le style d'Hergé et le domaine classique
1/ y a-t-il une école Hergé?
- l'école de Bruxelles pour la ligne claire d'abord et
pour les mouvements dans l'oeuvre d'Hergé:
a) l'esthétique (avec ses lois graphiques telle la ligne claire
dont l'origine pourrait se situer
dans les travaux de publicité effectués par Hergé
b) l'idéologie (actualité, mythe, aventure, théâtre)

2/ l'école de Bruxelles façe au style d'Hergé
- elle se développe autour d'Hergé et de Jacobs sous l'influence
d'Alain Saint-Ogan, Mac Manus et Bouillot (Gus Bofa) pour Hergé
alors qu'Alex Raymond influençera surtout Jacobs
- on peut dire du style d'Hergé qu'il est une école parce qu'il a
instauré des lois esthétiques minimales et maximales
et que ces lois sont devenues des unités significantes
- la combination de l'idéal technique
avec l'idéal mythologique s'appelle le classicisme
- discussion sur les disciples de l'école de Bruxelles
(Martin, Evany, Bob de Moor, Laudy, Leloup, Vandersteen)
- Eugène van Nijverseel (Evany) est le premier héritier
d'Hergé avec Bob de Moor, puis suivirent aussi Cuvelier,
Tillieux, Macherot, Uderzo, Hermann et surtout Craenhals
ainsi que Tibet avec son Chick-Bill, genre de sous-Tintin

3/ l'école du classicisme et de la simulation
>> p. 41 la fausse planche de Tintin réalisée en 1965
par Martin et Bob de Moor "presque plus vrai que l'original"
>> les "krolle bitches" = petites frisettes dans le dessin
= signes du mouvement
- Bob de Moor reste toutefois le seul membre réel, idéal
et parfait de l'école de Bruxelles (Barelli)
- dans la perspective classique, l'oeuvre produit toujours
quelque chose dont la pensée de l'auteur en particulier
- le système de la communication
- le système du discours de vérité
- le style Jacobs avec le texte traité comme substitut de l'image
ce qui n'est pas de la redondance,
mais correspond à un "effet de littérature"
n.b. les héritiers d'Hergé raffolent
des citations-clins d'oeil à leur maître


B) la génération des passeurs

1/ Marc Smeets ou le choc de l'underground
- la Hollande reste le pays européen qui a le mieux assumé et promu
un mouvement underground dans la bande dessinée (contre-culture)
- le style de Smeets (spécialiste de l'underground érotique)
sera une rétroversion ludique du style d'Hergé
- les revues pionnières de l'underground en Hollande:
"Aloha" et "tante Leny presenteert" (avec Harry Buckinx)

2/ l'art moderne de Joost Swarte
- c'est l'authentique créateur de nouvelles images
- le style de Swarte (qui débute dans l'esthétique industrielle
d'où son style à tendance moderniste et architectural)
prend sa source initiale du style de Vandersteen
- Swarte deviendra le chef de file de la ligne claire hollandaise
- les oeuvres de Swarte:
les aventures d'Hergé, il y a 50 ans - une deuxième Babel
- imago moderne - l'art moderne
- étude sur le style et l'oeuvre d'Hergé (dont "son altesse Riri")
Kuifje = Tintin en hollandais
>> p. 71 entretiens avec Joost Swarte

3/ Jacques Tardi, une esthétique de la citation
- auteur complexe, style dérivé de Jacobs,
mouvement carnavalesque de rétroversion des mythes,
sarcasme, marche de la mort en avant (momie,
ptérodactyle et démons dans Adèle Blanc-Sec)
- disciple de Jacobs quant à l'ironie macabre,
toutefois Tardi peut être considéré
comme l'initiateur absolu de la génération
des fils modernes d'Hergé et de Jacobs


C) les modulations modernistes

1/ Ever Meulen: une esthétique limite
- délire esthétique et architectural dérivé de Swarte et Smeets
- collabore à Curiosity-Magazine
- style reposant sur l'effet de déformation et de trompe-l'oeil
- l'héritier le plus éloigné d'Hergé
>> p. 86 et 87 une style spécial, hors-circuit,
mais des plus intéressant

2/ Théo van den Boogaard, un art de la chorégraphie
- influençé par l'underground, inspiré quelque peu de l'effet comique
et humour verbal d'un Achille Talon ou d'une Gaston Lagaffe
- humour et mécanique rhétorique combiné avec une logique du délire
>> p. 97 les Dupont(d)
- les oeuvres de van den Boogaard:
Léon van Oukel (1976), un anti-héros soixantiste (âgé de 60 ans)
semblable à Achille Talon - Ideograaf (1974) -
- l'album le plus significatif "Leon van Oukel s'en tire toujours"
= premier album publié en France (1980)
>> p. 93 interview avec van den Boogaard qui prétend que Hergé
a aussi trouvé son style chez Hiroshige (AD 12700)
>> voir plus bas information
et naturellement chez Geo MacManus

3/ Loulou Picasso, une clarté neuve
- Loulou Picasso ouvre un nouveau mouvement
lors de la période Bazooka (1974)
de "l'Echo des Savanes" avec l'art référentiel
n.b. Bazooka est un collectif d'artistes français comprenant
(noms d'emprunt): Kiki Picasso, Loulou Picasso,
Electric Clito, Lulu Larsen, Bananar ainsi que
(noms réels) Dominique Fury et Jean Rouzaud
- la filière swartienne en France passe obligatoirement par Bazooka,
une des expériences graphiques et dramaturgiques
les plus passionnantes des années 70
- c'est une nouvelle dimension de la mise en scène,
elle apporte à la bande dessinée une clarté neuve

4/ le mouvement parodique (les pastiches pornographiques,
Volny, Aloys, Ben Hardi)
- ce n'est pas vraiment du pastiche mais plutôt
de la dérision sur les thèmes et motifs de Tintin,
la dérision n'attaquant pas Tintin-image mais Tintin-mythe
- les principales publications
a) Tintin en Suisse (1976) édité par Charles Callico
et imprimé en une succession de diverses encres de couleurs
>> p. 103 ce pastiche fut dessiné par un collectif
de dessinateurs anonymes produisant le meilleur et le pire,
cette publication, somme toute sympathique,
car elle relevait de la parodie,
fut condamnée par les tribunaux belges, essentiellement
en raison des atteintes portées à l'image de marque de Tintin,
cette condamnation n'arrête pas les pirates pour autant:
en 1982, l'ouvrage est réédité, en couleurs,
avec un dos toilé, mais amputé malheureusement
des pages les plus intéressantes
b) Tientien en Bordélie par Roger Brunel (Circus 1980)
c) Dindin et le secret de Moulinsal par Jean Rouzaud (1974)
d) Titin et Marlou par Volny
e) Quickette et Flupkette par Aloys (1980)
f) Paris skouille-t-il? par Ben Hardi (1980)
g) Emile et Remi par Alph Desneuve (1982)


5/ Yves Chaland, simulation et mystification
- débute dans "Métal Hurlant", publie
avec Luc Cornillon l'album "Captivant" (un album culte)
>> p. 109/110 description des récits de l'album
(principalement des pastiches d'Alex Raymond,
Tillieux, Paape, Franquin, Hermann,
Hergé étant superbement simulé en deux strips)
à noter: dans l'album, les labyrinthes et dessins à relier
sont déjà réalisés au stylo rouge!
- les récits dans "Captivant" sont surtout une satire
de l'idéologie classique
- eet ce qui importe le plus dans la bande dessinée,
c'est le récit (Chaland dixit?)
- le pastiche se double aussi d'une volonté de restitution ironique
- le genre de la façon de symboliser la circulation
de l'information autour du monde par Hergé
>> p. 113 la parodie de Chaland faisant allusion au lancement de fusées
(>> voir les dernières pages du secret de l'espadon)
>> p. 114/115 entretiens avec Chaland

6/ le dossier Floch
- l'oeuvre maîtresse de Floc'h "le rendez-vous de Sevenoaks"
place d'entrée Floc'h dans le registre de la théâtralité jacobsienne,
rhétorique de l'apparence,
l'oeuvre typique étant "Blitz", le théâtre en BD
- Floc'h adore les histoires à huit-clos
et son album préféré est "les bijoux de la Castafiore"
>> p. 119 entretiens avec Floc'h
la lisibilité chez Hergé dont l'album se lit de gauche à droite,
Tintin ne revenant vers la gauche
que lorsqu'il a oublié quelque chose, c'est ça la perfection!

7/ Ted Benoit, de klare lijn
- débute dans "l'Echo des Savanes" en 1976
- le plus important des héritiers d'Hergé de par sa ligne claire
- ses oeuvres typiques: "hôpital" et "berceuse électrique"
- entretiens: a savouré tous les albums Tintin,
mais a mal digéré Tintin et les picaros

8/ le courant moderniste et l'évolution de la bande dessinée française
- se place dès 1977 dans le champ plus spécifique
de la création culturelle pour les adultes (Gotlib, Druillet, etc)
à noter: entretiens avec Jean-Louis Floch, frère de Jean-Claude Floc'h,
et ses oeuvres: Miranda, en pleine guerre froide


D) l'effet de boucle

1/ le courant neo-classique (Hé, Wininger, Dumas, J.-L. Floch, Briel, Jong)
- débute surtout dès 1978 dans "A Suivre" sur le thème de l'aventure moderne
- Hé, influençé par Jacobs et Giraud, collabore dans les années 70 à Pilote
(style sec, aéré et rigide, le faucon de Mu
= quelque peu remake du mystère de la grande pyramide)
- Wininger, imitateur de Tardi (Adèle Blanc-Sec)
- Dick Briel = le meilleur représentant de la veine mythologique
du style d'Hergé (le professeur La Palme, la grenade Oxy)

2/ Daniel Ceppi, l'aventure aujourd'hui
- Daniel Ceppi serait le meilleur dessinateur créatif du courant neo-classique
- la série de Stéphane est en fait de l'anti-exotisme au genre hyper-réaliste

3/ conclusion: le retour du même et de l'autre
- nous sommes une société de simulation
avec l'hologramme comme parfaite restitution du réel
- le monde du "montré" (figuration) et le monde du "rendu" (simulation)

4) quelques héritiers typiques du style Hergé
(mentionnés dans cet album):
Aloys - Ted Benoit - Ben Hardi - Bob de Moor - Dick Briel -
Daniel Ceppi - George Evany - Exem - Yves Chaland - Serge Clerc -
Jean-Claude et Jean-Louis Floch - Alain Goffin - Dominique Hé -
Ever Meulen - Heng't Jong - Loulou Picasso - Jean Rouzaud -
Didier Savard - Marc Smeets - Joost Swarte - Jacques Tardi -
Daniel Torres - Jean-Louis Tripp - Volny -
Theo van den Boorgaard - Pierre Wininger -


>> un album pour érudits de la bande dessinée,
écrit dans un style académique et hyper-abstrait de simulation
(texte dans le texte du texte), c'est de l'archéologie hergéenne,
mais enfin donnant un bon aperçu des imitateurs (héritiers) d'Hergé
avec de nombreuses études détaillées, références et entretiens
toutefois la vraie qualité de l'album réside dans les excellents illustrations
relatives aux études des styles et des auteurs, héritiers d'Hergé


annexes
- couverture de l'album
- la fausse planche de Tintin, plus vraie que nature!
- Kuifje et de klare lijn
- une planche de Ever Meulen
- une planche de Leon van Oukel s'en tire toujours
- une planche de tante Leney presenteert (en flamant)
par Swarte et collectif


Information
- Utagawa Hiroshige, né en 1797 à Edo, mort en 1858 à Edo)
est un dessinateur, graveur et peintre japonais,
il se distingue par des séries d'estampes
sur le mont Fuji et sur Edo (actuel Tōkyō),
dessinant de façon évocatrice les paysages et l'atmosphère de la ville,
en reprenant les instants de la vie quotidienne de la ville
avant sa transformation à l'ère Meiji (1868-1912).

- auteur prolifique, actif entre 1818 et 1858,
il crée une œuvre constituée de plus de 5400 estampes

- il est avec Hokusai, avec qui on le compare souvent
(pour les opposer) l'un des derniers très grands noms
de l’ukiyo-e et, en particulier, de l'estampe de paysage,
qu'il aura menée à un sommet inégalé
avant le déclin de la xylographie au Japon

- ses séries les plus connues, les Cent vues d'Edo,
les Soixante-neuf Stations du Kiso Kaidō
et surtout Les Cinquante-trois Stations du Tōkaidō,
rivalisent en notoriété avec la célèbre série de Hokusai,
les Trente-six Vues du mont Fuji (dont fait partie ce qui est sans doute
l'estampe japonaise la plus connue: la grande Vague de Kanagawa)

- le style d'Hiroshige est cependant bien différent de celui d'Hokusai.
Hiroshige se fait l'humble interprète de la nature, qui,
à l'aide des moyens frustes de la gravure sur bois, sait exprimer
comme à travers "une fenêtre enchantée"
les délicates transparences de l'atmosphère au fil des saisons,
dans des paysages où l'homme est toujours présent,
la composition de ses œuvres est saisissante,
caractérisée par une maîtrise subtile des couleurs franches
(avec une dominante du vert et du bleu)
son sens du premier plan sera repris plus tard par Degas,
que l'on retrouvera en photographie peu après
la réouverture forcée du Japon aux échanges avec l'Occident,

- c'est principalement à travers l'œuvre d'Hiroshige
que le monde découvre vers 1870
l'étonnante originalité des arts graphiques dans ce pays
- le japonisme aura une influence déterminante
sur les peintres impressionnistes et ensuite sur l'Art nouveau

couvertures:
Copyright 2008 - 2024 G. Rudolf