Suisse (et la guerre 1933-1945)

série: 2nd WW la guerre en Suisse
éditeur: Ex Libris
auteur: Rings Werner
classement: biblio423/727A
année: 1975
format: cartonné, avec jaquette
état: TBE/N
valeur: 30 €
critère: **
remarques: la Suisse et la guerre, 1933-1945,
la menace, l'ébranlement, affirmation d'un petit état
(voir aussi archives classeur 727)

livre basé sur les archives de cantons, de communes
ainsi que de privées (Massu, Kobelt, etc)

1/ le danger
dès 1933 (l'accession de Hitler au pouvoir),
la Suisse fut exposée à de graves dangers
la parade des nazis = un fleuve de feu
le 27.2.1933 incendie du Reichstag, ce fut le début des "wilde Verhaftungen"
et en Suisse, Hitler avait aussi ses partisans: le frontisme,
de nombreux groupements s'inspiraient alors
du "furor teutanicus"
la NZZ, la Neue Berner Zeitung et le Vaterland admiraient le programme d'Hitler
et en Suisse ce fut le début d'une petite guerre civile
puis vint en Allemagne, la lutte antisémite, les autodafés,
l'asservissement des intellectuels et de leur idéologie
notamment le suisse Karl Barth, domicilié en Allemagne
ainsi que Einstein, Thomas Mann, Remarque, etc
des milliers se réfugièrent à l'étranger dont des centaines en Suisse

menace par les frontistes suisses contre le Zürcher Schauspielhaus
qui se moquait du nouveau régime allemand
en juin 1934, nuit des longs couteaux,
élimination de Röhm
en Allemagne, l'assassinat politique était couvert par la loi

violation de la souveraineté suisse lors d'enlèvements d'émigrés allemands,
contrebande d'armes sur le lac de Constance
enlèvement en mars 1935 à Bâle par la Gestapo
de l'alsacien Berthold Jacob, un réfugié politique juif
protestation suisse énergique par le conseiller Motta
qui toutefois accepte des compromis avec l'Allemagne nazie
contre la restitution de Jacob,
la Suisse renonçait à dénoncer le viol du territoire suisse par la Gestapo
et à refouler de suite Jacob vers la France
Motta ne voulut pas faire perdre la façe à un voisin puissant
et à ne pas envenimer les conflits avec l'Allemagne pour le futur

2/ le raz-de-marée
le 4.2.1936 un étudiant juif abat à Davos le
chef
des nationaux-socialistes résidant en Suisse: Wilhelm Gustloff
l'affaire fur développée au maximum par l'Allemagne nazie,
des funérailles nationales furent organisées en Allemagne
et la Suisse rendue en partie responsable
discours d'Hitler à Schwerin lors de la cérémonie,
critique des juifs mais pas un mot sur la Suisse
>> p. 54 description de Gustloff et de la colonie allemande de Zurich

les plans d'Hitler pour les organisations nationales-socialistes à l'étranger
(Aufklärungseinheiten)
Rudolf Hess en était le responsable avec le Gauleiter Bohle, chef du "Gau Ausland"
il y avait 45 groupes locaux en Suisse

les suisses alémaniques étaient classés comme "Auslandsdeutsche"
et sur les cartes géographiques nazies Zurich, Bâle et Berne
étaient considérées comme villes et provinces allemandes!
puis le "Völkischer Beobachter" lança une série virulente contre la Suisse,
notamment contre la presse suisse
>> p. 30 l'article du Nebelspalter et p. 67 notamment sur Gustloff
>> p. 65 la carte nazie "Grossdeutschland 1935"

puis l'infiltration nationale-socialiste continua sans grande résistance énergique
de la part du conseil fédéral

3/ la crise
la crise économique des années 30 frappa la Suisse sévèrement
et le modèle Hitler était pris comme exemple de réussite économique
mais alors qu'en Allemagne, c'était presque la guerre civile suite à la défaite de 1918
par un peuple allemand qui rêvait d'être libéré de son humiliation,
la Suisse, à part quelques exceptions (grèves de Zurich et de Genève)
resta un pays calme et ordonné, toutefois la crise économique en Suisse
n'atteignit pas les proportions de celle subie par l'Allemagne
et ni les frontistes ni les communistes ne prirent une position déterminante en Suisse
>> p. 103 création cependant dès 1925 de quelques mouvements nationaux
d'inspiration patriotique tel le Schweizer Heimatwehr
avec sections à Zurich, Berne et en Thurgovie

toutefois, les tentatives pour appliquer en Suisse les méthodes allemandes échouèrent,
par exemple le gouvernement de Zurich resta socialiste
en Romandie, création de l'Union Nationale par Georges Oltramare avec un chef de front,
le colonel Arthur Fonjallaz qui était un admirateur de Mussolini
mais il n'y eut aucun groupement ou partie
semblable au national-socialisme allemand ou fascisme italien
la raison principale de ces échecs:
il n'y avait pas en Suisse de pouvoir central mais 22 cantons souverains aux opinions différentes
par la suite les membres restants de ces groupements
se développèrent en un genre de 5ème colonne
il y eut alors 55 arrestations pour espionnage et
quatre d'entre elles furent passés par les armes
>> p. 113 l'affaire Bloch, un marchand de bétail juif assassiné à Payerne en 1942

4/ le tournant
la paix sociale entre la bourgeoisie et les socialistes, entre employeurs et employés,
fut conclue par le pacte sur la paix du travail
alors que l'Europe pensait que la Suisse était devenue un centre révolutionnaire
avec la présence de Lénine et autres exilés bolchévistes
une grève générale eut toutefois lieu en novembre 1918
mais contrôlée par l'armée, elle n'eut pas de suite troublante et menaçante

le prof. Max Weber, d'abord dirigeant syndical, militant socialiste et anti-militariste
changea son opinion lors de l'accession d'Hitler au pouvoir
dès lors, le parti socialiste refusa tout idée révolutionnaire
et accepta le principe de la défense nationale avec une armée forte et bien dotée
un réflex de défense nationale commença donc de s'installer en Suisse dès 1938
>> p. 133 l'affaire Klein, correspondant des Basler Nachrichten à Berlin,
menacé d'expulsion en 1935

le pacte de paix social fut conclu grâce à l'esprit commun
pour préserver et conserver la Suisse telle qu'elle était
mais la politique étrangère du conseil fédéral ne fut pas toujours brillante
en se soumettant souvent à la pression étrangère
en contradiction avec la volonté de résistance du peuple suisse
toutefois le conseil fédéral avait toutefois une liberté d'action plutôt étroite
et devait faire bon ménage en négociant des compromis difficiles avec son puissant voisin
étant particulièrement exposé aux reproches et attaques allemandes
qui étaient surtout dirigées contre la presse suisse
>> p 143 la guerre des journeaux
ainsi que par les critiques d'autres protagonistes

tel celle à cause de la reconnaissance du régime de Franco avant la fin des hostilités
et tout comme la reconnaissance - en tant que premier état démocratique -
de l'empire italien en Ethiopie
ces déclarations empressées donnèrent un coup irréparable
au prestige du conseiller fédéral Motta
par la suite, en tant que ministre des affaires étrangères, Motta dut s'efforcer
de rétablir plus dignement la position de neutralité de la Suisse
>> n.b. p. 144/145 les volontaires suisses qui avaient combattu pour les républicains
durant la guerre civile espagnole furent condamnés
à leur retour à des peines d'emprisonnement
(y en avait-il eu qui avait combattu pour Franco?)
tandis que les soldats de la légion Condor furent traités en héros à Berlin!

5/ la tempête
le 28.8.1939 la Suisse mobilise 100'000 hommes sur les frontières,
Henri Guisan est élu général, 2 jours après la guerre éclatait
la Suisse reste sans défense contre cette nouvelle technique de guerre
l'aviation suisse consistait alors en 18 chasseur aptes au combat, 36 chasseurs vieillis
et 80 avions d'observation, aucun bombardier
31 pièces d'artillerie contre avions et 8 projecteurs pour toute la Suisse

en 19 jours, la Pologne s'écroula (
alors que les alliés prévoyaient qu'elle pourrait résister durant une année)

les conditions de l'armée suisse dont l'organisation datait de 1907 étaient déplorables
malgré les efforts du conseiller fédéral Minger,
la Suisse n'avait pas pu comblé son retard dans l'armement à cause de la crise économique
toutefois une organisation "fantôme" d'économie de guerre avait été mis en place
par le conseiller fédéral Obrecht et put parer au plus pressé
et durant les 6 mois de la drôle de guerre,
la Suisse bénéficia d'un délai pour la restructuration de son armée

- suite aux fortifications de la ligne Maginot,
deux possibilités s'ouvraient à l'Allemagne pour son offensive occidentale:
la Belgique ou un corridor via la Suisse pour prendre l'armée française à revers

- la résistance de la petite Finlande contre l'invasion soviétique fut un exemple pour la Suisse
- introduction de l'allocation pour perte de gain durant le service militaire
- changement à l'état-major de l'armée et au conseil fédéral:
Motta décédé est remplacé par le vaudois Marcel Pilet-Golaz

le 10.5.1940 mobilisation générale en Suisse
la concentration de troupes allemandes sur la frontière nord
cause une certaine panique parmi la population des frontières
le contrôle imposé sur la presse et le cinéma cache quelques vérités au peuple suisse
à la frontière française, devant l'avance de la 2ème division blindée de Guderian,
42'000 soldats français avec 2000 véhicules
et 6000 chevaux se réfugient en Suisse

la Suisse maintenant encerclée par les forces de l'Axe dut céder aux pressions allemandes:
démobilisation partielle et livraison de matériel de guerre à l'Allemagne
et le général Guisan qui devait punir les abus contre l'Allemagne
prenait secrètement le parti de l'homme qui était puni, c'était le double jeu

et le 25.6.1940 Pilet-Golaz, président de la Confédération, s'adressa au peuple suisse
>> p. 176 l'écho du discours
l'allusion à un nouvel ordre européen comme mentionné par Pilet-Golaz
ne trouva pas un grand assentiment parmi le peuple
et causa du mécontentement chez les alliés
alors que la satisfaction était manifeste chez les pays de l'Axe
mais Pilet-Golaz ne mentionnait pas si la Suisse en cas d'invasion allemande
devait combattre ou capituler
et le discours fut surtout mal accepté par l'armée
ce qui incita Guisan à faire en juillet 1940 une déclaration publique
quant à l'indépendance de la Suisse

6/ la résistance
le 10.5.1940 l'agression contre 3 petits états neutres
déclancha un tonnerre d'indignation en Suisse
à la frontière nord, il y eut des combats aériens
car les avions allemands empruntaient l'espace aérien suisse
pour des attaques contre l'arrière-pays français

le 11.5. une seconde mobilisation rappelle env. 500'000 hommes
mais le danger était surestimé et la Suisse comme la France
furent victimes d'une duperie raffinée
le bluff était parfait et le haut-commandement français fut convaincu
que les allemands allaient tourner la ligne Maginot via la Suisse
les services de renseignement dirigés par Masson avaient failli à leur tâche
toutefois en juin 1940, le chef du groupe allemand C
avait bien dû élaborer un plan d'attaque pour la Suisse!

entretemps l'aviation suisse disposait maintenant de 50 chasseurs Messerschmitt M-109
que l'Allemagne venait de lui livrer suite à une commande antérieure payée à l'avance
et les pilotes suisss avaient eu le temps de bien s'entraîner
plusieurs bombardiers allemands furent abattus
>> p. 193 le plan d'attaque "Tannenbaum" contre la Suisse
le Reich protesta contre ces actes d'hostilité qui furent refutés par le conseil fédéral
le 8.6. une expédition punitive fut organisée par Goering
>> p. 198 la technique suisse d'attaque et de défense aérienne
qui impressionna la Luftwaffe
mais même avec un certain succès, que pouvait faire l'aviation suisse
contre la machine de guerre allemande
le 9.6. Hitler lui-même prit l'affaire en main

la tension entre les deux pays montait sensiblement
c'est alors que le conseil fédéral procéda à de notables concessions envers l'Allemagne
(excuses, indemnisation, renoncement à intervenir
lors de légères violations de territoire)
et le frontisme réapparut en Suisse alors que le pouvoir d'action du haut-commandement
commençait à devenir instable suite à l'attitude de certains officiers germanophiles
c'est alors que des commandos communaux firent leur apparition
pour combattre les frontistes en cas de guerre
notamment la Ligue du Gothard (dont Gottlieb Duttweiler faisait partie)

le 25.6. l'effondrement de la France porta un coup dur à la résistance suisse
et on se demandait si une résistance même héroïque mais sans espoir avait encore un sens
l'autre alternative était une résistance passive et calculée
>> p. 210 l'affaire entre les officiers Ernst et Däniker

Ernst l'emporta et ce fut plus tard avec Guisan la stratégie du réduit national
ainsi qu'une résistance à outrance qui ferait payer trop cher à l'Allemagne une invasion de la Suisse
>> p. 211 le bureau Ha = service secret unique: l'agence d'information Hausamann
restait à déterminer à ce moment la position que prendrait le général
vis-à-vis d'une capitulation par le conseil fédéral
>> p. 212/213 préparation d'une conjuration d'officiers
destinée à défendre la Suisse par les armes

la conjuration fut découverte mais le général ne voulut pas condamner les conjurés
et par la suite une association dans ce sens
vit le jour "Aktion national Widerstand"
n.b. en été 1940, la résistance se présentait comme une étrange assemblage
de réseaux indépendants les uns des autres,
de types et d'origines les plus divers mais
néanmoins reliés par des fils invisibles

7/ l'épreuve
l'affaire des archives secrètes du QG français trouvées dans un train
par les troupes allemandes le 16.6.1940 à la Charité-sur-Loire
dont un paquet concernant les relations avec la Suisse,
notamment un accord franco-suisse
visant à collaborer militairement en cas d'invasion allemande
le commandement en chef de l'armée suisse semblait gravement compromis,
cependant la trouvaille fut tenue secrète aussi bien en Allemagne qu'en Suisse
ce fut un jeu de cache-cache qui était principalement mené en secret du côté suisse
par un aide-de-camp (nommé plus tard chef de l'état-major) de Guisan: Bernard Barbey

juridiquement la Suisse avait le droit et le devoir de protéger
son indépendance par tous les moyens
l'Allemagne fit comme si rien n'était, en gardant toutefois ces documents
sous forme de menace pour Guisan
qui en cas de révélation aurait été dans une situation difficile

malgré tout la politique du réduit national (Festung Alpen)
était déjà mis à l'étude dès le 10.6.1940
avec un noyau central autour du Gothard et du Loetschberg
mais dans ce cas les 3/4 de la population auraient dû être abandonnées à leur sort
>> p. 234 le réduit alpin avec les 3 centres de fortification:
St-Maurice, Gothard et Sargens

le but étant de dissuader le haut-commandemenet allemand
à livrer une guerre longue et coûteuse
à ce sujet, un rapport d'armée, un rassemblement des hauts officiers de l'armée
dans la prairie du Rütli fut organisé par Guisan le 25.7.1940
c'était toutefois un risque à courir en cas de sabotage,
par exemple sur le bateau transportant 485 officiers supérieurs

le Reich protesta énergiquement contre ce rassemblement
>> p. 240 et la Wehrmacht élabora les plans d'une attaque contre la Suisse,
l'objectif étant d'empêcher les forces armées suisses de se retirer en haute montagne

Guisan recommanda au conseiller Minger d'envoyer à Berlin un nouvel homme,
par exemple Carl J. Burckhardt, pour une politique d'adaptation
mais Minger ne voulut pas y donner suite
la situation restait donc incertaine et le conseil fédéral
ainsi que le général passaient par des phases de courage et de faiblesse

mais de plus en plus, la Suisse devait se conformer aux désirs de son puissant voisin
tout en prêchant l'indépendance et la résistance,
le terrain devenait de plus en plus glissant

particulièrement, le président Pilet-Golaz se montra trop coulant
notamment envers les chefs des frontistes regroupés dans un nouveau parti
"le mouvement national suisse"
n.b. il y eut environ 400 suisses qui auraient servi dans les unités SS de la Wehrmacht

8/ la guerre des nerfs
ce fut surtout une guerre des journeaux et des démarches diplomatiques
pour démoraliser la Suisse
et les correspondants des journeaux suisses en Allemagne
étaient particulièrement placés sous surveillance
la presse suisse était souvent l'objet de menaces
menées directement par l'attaché de presse allemand en Suisse
qui n'utilisait pratiquement pas la voie diplomatique
>> p. 255 die Aktion Tromp sur le rédacteur de la NZZ
(premier journal du continent?)

et les hauts fonctionnaires politiques suisses, et même parfois Guisan,
préconisaient une censure préventive
toutefois les organisateurs de la résistance suisse firent front
et obtinrent finalement la cessation de ces tracasseries
ils réussirent à faire échouer l'Aktion Tromp
le principe démocratique de la liberté de la presse demeura ainsi respecté
malgré quelques interventions pour limiter certaines vérités envers le Reich
>> p. 274 ainsi le "Nebelspalter" qui avait publié 54 caricatures d'Hitler
durant la dernière année de la paix
n'en publia plus que 8 au cours des 5 années suivantes

et la presse suisse eut à l'étranger la réputation d'être vraiment neutre
en étant la voix de la vérité
le prof. von Salis, l'un des journalistes et rédacteurs suisses,
fut particulièrement écouté à la radio avec sa "Weltchronik"

quelques personnalités du monde politique et économique suisse
essayèrent aussi de soutenir la demande du Reich contre la presse
il y eut bien un comité d'action "der Volksbund" à ce sujet
mais qui n'obtint pas de meilleurs résultats dans ses efforts contre la presse suisse

9/ les carrefours
on ignorait alors jusqu'à quel point la 5ème colonne d'Hitler
était dangereuse ou inoffensive mais celle-ci inquiéta souvent la Suisse
la Suisse qui avait la plus forte colonie allemande en Europe et contrôlé par la NSDAP
le successeur de Gustloff, von Bibra, grâce aux victoires allemandes,
avait pu rallié des partisans en nombre toujours plus grand (30'000 membres)
et il y avait l'effectif d'une division (=12'000 hommes) en état d'être apte au service militaire
qui s'étaient organisés en groupes sportifs paramilitaires dans l'attente d'une action
des manifestations étaient d'ailleurs mises en place dans plusieurs villes suisses dont Bâle

le cas de Bâle
en cas d'agression allemande, Bâle ne pouvait pas être défendue
et avait été déclarée ville ouverte
à l'intérieur du pays, la police politique était mieux à même de surveiller les
groupements nationaux-socialistes et cette police,
doublée d'autres éléments défensifs, était très efficace

grande manifestation à Zurich de la colonie allemande en octobre 1942
avec Bohle, spécialement venu de Berlin mais ce fut la dernière manifestation de ce genre
le 19.11.1940 le conseil fédéral avait déjà fait dissoudre le "Mouvement National"

>> p. 304 la situation de la Suisse en été 1940/hiver 1941
la France et la Grande-Bretagne étaient coupées de l'Europe,
les balkans étaient envahis par la Wehrmacht
qui ne rencontrait pas de grande résistance
le moral était en sonéquence plutôt bas en Suisse et à cette période,
on se demandait si la volonté de résistance persisterait
en avril 1941, le général voulut informer la population
en donnant des conférences à travers le pays
une équipe médicale suisse fut envoyée à Smolensk sur le front est en 1941,
ceci pour des missions humanitaires sous le patronage de la Croix Rouge
et ses membres assistèrent à des exécutions sommaires, surtout de juifs,
sur le théâtre des opérations militaires
le conseil fédéral en fut informé à leur retour mais les journeaux
ne furent pas autorisées à divulguer ces faits
la presse devait se taire!

10/ une sombre page
la politique pratiquée par la Suisse envers les réfugiés
est considérée comme une tache noire et pourtant les chiffres plaident pour le contraire
durant la 2ème guerre mondiale, la Suisse a accueilli 60'000 enfants (moins de 16 ans),
104'000 soldats étrangers et 66'000 habitants de régions voisines ainsi que
295'000 réfugiés dont 30'000 juifs
est-ce vraiment l'aveu d'une faute?
et pourtant l'historien Bonjour a prétendu que la Suisse aurait pu faire mieux
tout comme semble l'indiquer aussi le livre d'Alfred Häsler "das Boot ist voll"

en 1938, les autorités fédérale acceptèrent que l'Allemagne
puisse apposer la lettre J (juif)
sur les passeports des juifs allemands
et ceux-ci ne pouvaient plus alors entrer en Suisse librement
ce qui souvent équivalait à une condamnation à mort
mais cela n'était pas prévisible en 1938,
cependant c'était déjà une attitude antisémite

>> p. 316 l'enquête parmi ses lecteurs de l'Emmentaler Blatt
en 1935 sur la question juive en Suisse
et celle-ci révèla qu'il existait bien uen forme d'antisémitisme en Suisse
l'enquête de l'Emmentaler Blatt révèla aussi que 83% des réponses
étaient marquées d'antisémitisme mais on considérait en grande partie
malgré tout les juifs comme citoyens égaux devant la loi

les frontistes proclamaient bien sûr que les juifs faisaient le malheur du pays
et le "Stürmer" (journal nazi interdit en Suisse
mais introduit illégalement en contrebande)
par la plume de son rédacteur-directeur Julius Streicher
vouait les juifs au diable!

toutefois sur une population d'alors de 4 mio de suisses,
il n'y avait environ que 20'000 juifs = 0,5% de la population
et de toute façon, les juifs qui voulaient se réfugier dans les pays étrangers
étaient considérés par ceux-ci comme réfugiés "encombrants"
l'antisémitisme était devenu de bon ton dans les années 30

des contrôles sévères furent introduits à la frontière suisse
mais la population suisse en général accueillait les réfugiés généreusement
par contre, la police fédérale réagit autrement
vis-à-vis des 180'000 juifs de l'Autriche devenue allemande
tout en voulant adopter une attitude humanitaire envers ces réfugiés
il fallut alors négocier avec le Reich qui au début
n'était pas vraiment opposé à l'émigration juive
après avoir dépouillé ceux-ci de leur fortune

Heinrich Rothmund, chef de la police des étrangers,
ne voulait pas un excès de population étrangère en Suisse
finalement l'Allemagne accepta l'apposition de la lettre J
sur les passeports allemands des juifs
et dès lors, les juifs ne pouvaient plus être acceptés en Suiise
que s'ils présentaient un visa d'entrée pour la Suisse
mais l'affaire du tampon J négociée avec l'Allemagne fut passée
au silence par le conseil fédéral
fin 1938, 150'000 juifs avaient trouvé refuge en pays étranger
dont principalement en France (50'000)

l'internement des soldats français en Suisse coûtait
à la France 100'000 francs suisses par jour
en Allemagne débutait alors ce qui allait devenir "la solution finale"
après la défaite de la France, 190'000 juifs furent déportés
et la France devait encore payer 700 Reichsmark par déporté!

le conseil fédéral fut informé des condamnations et déportations
ces rapports portaient la mention "rigoureusement confidentiel"
à Wannsee le 20.1.1942 fut décidé l'élimination de
11 mio de juifs en Europen

et à partir de cette date, les frontières suisses
furent pratiquement fermées pour les juifs
toutefois la novuelle de cette fermeture provoqua en Suisse un tollé général
mais Rothmund ne cèda pas aux différentes pressions
les oeuvres suisses d'aide aux réfugiés déclarèrent toutefois
qu'ils ne reconnaisseraient pas cette mesure
et par la suite, le conseil fédéral dut assouplir sa position
des milliers de réfugiés furent malgré tout refoulés
fin 1942, il y avait 16'400 réfugiés en Suisse
et à la fin de cette même année, des dons au montant de 60 mio de francs
furent générés pour l'aide aux réfugiés

il fallait quelque peu comprendre les mesures du conseil fédéral
car les cantons ne le soutenaient guère
et ceux-ci n'étaient en général pas disposés à recueillir des réfugiés
pour l'armée, les réfugiés étaient aussi un élément d'insécurité
il fallait plusieurs régiments pour garder les internés
et même Guisan conseillait de rester ferme au sujet des réfugiés

les frontières n'allaient s'ouvrir vraiment qu'à l'arrivée des alliés en 1944

il y eut aussi des transactions financières pour la libération d'internés juifs,
par exemple en janvier 45, 5 mio de francs furent négociés avec Himmler
pour la libération de 1200 juifs depuis le camp de concentration de Theresienstadt

11/ l'espionnage
le service de renseignement suisse a été plutôt efficace
durant la 2ème guerre mondiale
son réseau d'information avait des ramifications
jusque dans l'entourage d'Adolf Hitler
mais parfois il tombait aussi dans le panneau
(>> voir chapitre 6 la résistance)
et pourtant ce service de renseignement n'avait rien de particulier
mais la chance a aussi joué un rôle

les meilleures informations provenaient de bureaux privés
(tel le bureau Ha qui fut en partie assimilé aux services de renseignement de Masson)
grâce à leurs relations commerciales
il y eut aussi le réseau Pünter (Pakbo)
et celui de l'émigré allemand Roessler qui collaborait avec le bureau Ha
tous les trois disposaient de sources d'information sûres et efficaces
mais aucun ne révèla le secret de leur identité

la ligne Wiking
le terminal suisse de cette ligne mystérieuse était à Bâle
au poste appelé "Pfalz" dirigé par Emil Häberli, procureur d'Etat
la ligne s'appelait Wiking car elle avait annoncé à l'avance
l'offensive allemande contre la Norvège
que l'on avait pas voulul croire

bien sûr, il y eut aussi des espions pour l'Allemagne principalement recrutés en Suisse
étant au centre de l'Europe, la Suisse était le terrain de chasse idéal
pour les espions internationaux
on y comptait entre autres:
- Allan W. Dulles de l'OSS américain basé à Berne
- le chef d'état-major Georges Groussard appelé sous le nom de code
"colonel Gilbert" travaillait pour De Gaulle
- l'attaché militaire japonais Okamoto
- les organisations d'espionnage soviétiques

notamment les services soviétiques opéraient dans l'illégalité la plus complète
puisqu'il n'y avait plus de relations diplomatiques entre la Suisse et l'URSS

on neréussit à localiser les trois émetteurs rouges qu'au début de 1943
où une base principale de l 'espionnage soviétique (l'affaire Hamel)
fut découverte à Genève et à Lausanne
des codes secrets durent être déchiffrés
et le chef put être démasqué: c'était le genevois Alexandre Rado
le réseau Rado, averti à temps, put échapper à leur arrestation
mais d'autres réseaux furent arrêtés
tel le réseau "Sissy" (qui dépendait de Rado)
et le réseau "Lucie"

fin 1942, en Allemagne, le réseau soviétique "rote Kapelle" venait d'être démantelé,
plusieurs de ces espions étaient d'ailleurs des agents doubles

la politique d'espionnage se jouait aussi
entre les deux chefs des services suisses et allemands:
Roger Masson et Walter Schellenberg
et même Guisan rencontra par deux fois Schellenberg
(peut'être que l'Allemagne voulait la confirmation de la neutralité suisse
façe à l'avance des alliés, peut'être pour profiter de quelques privilèges)
on ne connut jamais la teneur de ces discussions, il n'y eut aucun rapport écrit
et en son temps le conseil fédéral ne fut pas informé de ces rencontres

12/ la délivrance
les chances de survie économique de la Suisse était également très faibles
cette guerre économique pouvait causer un blocus complet
les navires neutres étaient soumis à un contrôle sévère par les flottes alliées
l'Allemagne étant le meilleur client de la Suisse, les alliés demandèrent
que les biens importés par la Suisse n'atteignent
en aucune façon l'Allemagne
il fallait donc négocier âprement avec les alliés sur ces problèmes
chaque belligérant (les alliés pour les matières premières,
lAllemagne pour le charbon) demandèrent en contre-partie
des livraisons de matériel de guerre (instruments de précision, etc)
celles-ci prirent d'abord le chemin de la France et de la Grande-Bretagne,
puis après la défaite de la France, le chemin vers l'Allemagne

mais surtout le IIIème Reich était en mesure d'étrangler l'économie suisse
des matières de remplacement (matières usagées, rationnement
et répartition sévère des matières premières)
un régime de guerre fut mis en place, il y eut aussi la transformation
radicale de l'agriculture selon le plan Wahlen,
surtout pour les fruits et les légumes dont la pomme-de-terre

la Suisse avait sa propre flotte de haute mer
(26 navires dont l'un fut torpillé et deux autres coulés)
les négotiations avec les pays étrangers se faisaient
sur la base "do ut des" = donnant-donnant
et l'atout de la Suisse était principalement les tunnels alpins

le montant du crédit mis à la disposition de l'Allemagne atteignit
1 milliard de francs contre la livraison de matières premières

il y eut bien sûr les reproches des pays alliés
pour les livraisons suisse de matériel de guerre à l'Allemagne
les alliés prirent même des contre-mesures et en 1943
il y eut un blocus de 8 mois par les alliés

mais la véritable facture arriva au début de 1945:
arrêt des exportations vers l'Allemagne, arrêt du transport transit alpin,
avoirs allemands bloqués et la Suisse dut payer à l'avance 250 mio de francs
pour la future reconstruction de l'Europe,
toutefois ce contre-blocus causait aussi de sérieuses difficultées
à la Grande-Bretagne qui avait besoin d'importer de Suisse
du matériel de guerre de haute précision (horlogerie, microtechnique, etc)
ceux-ci étaient expédiés via l'Italie par colis postaux vers les Amériques
puis vers la Grande-Bretagne
les allemands ayant découvert ce trafic, il fallut
utiliser la contrebande via le Portugal

mais les importations de la Suisse depuis l'Allemagne
excédait de beaucoup les exportations,
l'excédent des importations s'élevait à 1,5 milliards de francs

et donc aucun pays n'avait intérêt à voir une Suisse ruinée ou dévastée
les alliés avaient intérêt à garder une Suisse neutre et intacte
au coeur de l'Europe tout comme les allemands
qui auraient dû payer le prix fort en cas d'invasion de la Suisse
et qui n'auraient pour autant pas pu bénéficier de l'économie
et de la situation de la Suisse qui travaillait à l'abri des bombardements
pour la machine de guerre allemande tout en restant un terrain neutre
pour les transactions financières

l'armée suisse était pourtant bien faible et ceux qui ont surtout oeuvré
pour la neutralité et l'indépendance suisse
furent principalement les diplomates et hommes d'affaires
qui ont su faire jouer les forces démocratiques de la Suisse
n.b. contrairement au livre de Kimche "un général suisse contre Hitler",
le livre de Rings ne fait pas grand cas
(en tout cas pas d'un symbole de résistance) du général Guisan


>> un bon livre avec surtout d'intéressantes illustrations,
mais pas toujours facile à suivre
c'est principalement une documentation historique
qui se base sur des faits et chiffres réels
ce n'est donc pas un roman historique comme le livre de Kimche
(bien que celui-ci se base aussi sur des faits réels)

n.b. à étudier (voir annexe) le cas du tampon J (pour juif)
apposé sur les passeports allemands
dont les explications en sont pas toujours très claires
les sources de cet ouvrage >> voir annexe classeur 727A

annexes
- couverture du livre
- carte nazie de l'Allemagne en 1935
- le tampon J sur les passeports allemands
couvertures:
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